Plaire aux jeunes clientèles : un défi pour les institutions artistiques
Dans une entrevue qu’il a accordée au Huffington Post Québec, le directeur artistique du Théâtre Jean Duceppe (Montréal, QC), Michel Dumont, affirmait que «le rapport entre le théâtre et les jeunes s’est déglingué», que ces derniers connaissent peu l’hitoire et les artisans du théâtre. «Il faut amener les ados à s’intéresser à ça ! C’est pas tout d’éduquer un peuple, il faut le cultiver!», a-t-il dit.
Ce rapprochement souhaité avec de plus jeunes clientèles se veut une réponse au vieillissement des publics et à la multiplication des sources de divertissement maintenant à la portée de tous les amateurs d’arts, peu importe leur âge.
M. Dumont a énuméré quelques-unes des approches mises en place par Duceppe pour courtiser les jeunes publics :
- Des abonnements parent-enfant
- Des tarifs réduits pour les 12-17 ans et les 18-30 ans
- Des visites de coulisses
- Des causeries après-spectacles
- Des programmes plus punchés
Toutes ces initiatives sont valables, mais elles demeurent quelque peu traditionnelles. Il est certain que les coûts des billets, parfois élevés, sont est un obstacle majeur à la fréquentation des jeunes. Par contre, nous savons que ceux-ci n’hésitent pas à débourser une dizaine de dollars pour aller au cinéma et parfois beaucoup plus pour assister à un concert de musique populaire. Pour le théâtre, il est préférable de rapprocher les prix de ceux du cinéma.
Si Duceppe nous consultait, ma collègue Diane Chevrette et moi, nous lui recommanderions, entre autres, les solutions suivantes pour courtiser les jeunes :
- Il est important de consulter et de répondre aux attentes des jeunes clientèles. Elles seront plus réceptives à vos offres si vous sollicitez d’abord leur avis et agissez ensuite en fonction de leurs recommandations. Préparez-vous à sortir de votre zone de confort.
- De nombreuses études et pratiques exemplaires, mentionnées sur ce blogue, ont révélé que les jeunes sortent d’abord pour se divertir et socialiser (en voici des exemples récents, ici et là). Ils veulent apprendre et découvrir de nouvelles choses. Ils sont ouverts à des propositions plus risquées. Pas besoin de les convaincre de tout voir. Il suffit de leur recommander ce qui risque de les intéresser et de les accompagner dans leur exploration.
- Les jeunes clientèles vous intéressent ? Intégrez-les à votre fonctionnement, à votre conseil d’administration, à votre équipe. Faites-en des ambassadrices et des ambassadeurs auprès de leurs pairs. Appuyez-les activement dans ce rôle et donnez-leur les outils dont ils auront besoin pour convaincre leurs amis.
- Prenez le temps de les introduire au théâtre, à son histoire, aux réalisations de votre compagnie, aux rôles que les jeunes y ont joué au fil des décennies. Permettez-leur de rencontrer vos artistes dans un cadre informel (fournissez la bouffe et les breuvages !). Faites-leur des confidences. Racontez-leur des hsitoires amusantes. Laissez de côté le jargon artistique ou administratif que vous destinez aux bailleurs de fonds. Soyez honnêtes, chaleureux, humbles et réceptifs.
- Si vous pouvez les introduire aux secrets du jeu, de la mise en scène et aux différents métiers du théâtre, tant mieux. Cette responsabilité n’incombe pas uniquement à l’école.
Il vous faudra plus d’une rencontre, plus d’une démarche pour mobiliser de jeunes publics. Ce recrutement se fait bien souvent une ou quelques personnes à la fois.
Vous avez réussi à les convaincre de s’amener chez vous ? Bravo ! Contactez-les par la suite pour recueillir leurs impressions, vous assurer de leur satisfaction et leur proposer une autre sortie en votre compagnie.
Oui, c’est beaucoup de travail, mais l’avenir du théâtre et de bien d’autres disciplines artistiques passe par le renouvellement et la diversification des clientèles. Personne n’y échappe. Et l’approche personnalisée demeure la plus efficace pour y parvenir.