Diversité culturelle, développement de publics et médiation culturelle

Le plus récent numéro de la revue de théâtre JEU (no. 156) contient deux articles qui ont retenu mon attention. D’abord, une entrevue avec le président du Conseil québécois du théâtre (CQT), Jean-Léon Rondeau (Jean-Léon Rondeau au CQT : pour le théâtre de demain, de Raymond Bertin), puis un texte sur la médiation culturelle (Médiation culturelle, quand tu nous tiens, de Sara Dion).

M. Rondeau aborde la question de la diversité culturelle et du développement de publics qui seront discutés lors du 13e Congrès du théâtre québécois qui aura lieu du 12 au 14 novembre prochain, à Montréal.

Sur le plan de la diversité culturelle, je pense que nous, le milieu francophone blanc, sommes un petit peu en retard, avoute-t-il. (…) Il faut intégrer dans le théâtre au Québec les gens de ces communautés, sur scène et dans la salle. À Montréal et autour, si on regarde les chiffres, ils représentent près de 40 % de la population. Ce n’est pas ce qu’on voit au théâtre, même s’il y a de plus en plus d’initiatives, de mixité, de productions spécifiques de certains groupes ou dont les membres s’intègrent dans des spectacles, au Théâtre d’aujourd’hui, au MAI (Montréal, arts interculturels), au Quat’Sous…

Les propos de M. Rondeau s’apparent à ceux de la présidente de l’Union des artistes (UDA), Sophie Prégent, qui affirmait récemment qu’en matière de diversité dans le milieu artistique québécois, « On est 10 ans en retard sur Toronto et 15 ans en retard sur les États-Unis ».

Je salue cette ouverture manifestée à la fois par le CQT et l’UDA, de même que des initiatives comme Polyglotte, d’Olivier Choinière, Espoir ⁄ Espwa, du Théâtre français de Toronto (TFT), et Sans pays, du Théâtre du Tandem. J’appuie l’intégrétion d’artistes issus de communautés culturelles au milieu théâtral en général, mais je suis encore plus favorable à leur céder la scène pour qu’ils nous racontent leurs histoires. C’est la meilleure façon de courtiser les membres des communautés culturelles, une clientèle souvent négligée par les diffuseurs de théâtre, et d’en faire des complices, comme le suggère M. Rondeau.

Par ailleurs, Sara Dion rappelle que médiation culturelle et développement de publics vont de pair.

Le développement du public peut assurément découler d’une bonne pratique de médiation culturelle, mais devrait-il en être l’objectif ? (…) Oui, à condition de soutenir cette idée avec la créativité et les ressources qui en assureront la qualité et la longévité. Il en va de même pour l’usuelle rencontre avec les artisans d’un spectacle après la représentation ? (…) Entrer en médiation, n’est-ce pas apprendre l’un de l’autre ?

Elle émet tout de fois une mise en garde.

L’un des dangers d’amalgamer médiation culturelle et développement du public est peut-être d’en venir à penser les œuvres et les programmations comme des produits à bonifier, et les spectateurs comme une clientèle à satisfaire, figeant les activités de médiation et les expériences clients redondantes et creuses. D’autant plus qu’attirer − leurrer ? − de nouveaux spectateurs avec des gratuités et des activités sans rigueur artistique n’assure en rien le développement d’un intérêt durable ou la tenue d’échanges stimulants. On risque l’ennui et la déception, mais aussi la dévalorisation de l’art et de la médiation.

Ce qui doit être bonifié, c’est l’expérience totale de sortir au théâtre, de l’accueil jusqu’aux interactions entre les artistes, les spectateurs et le diffuseur, y compris la cueillette des impressions du public. Les consommatrices et les consommateurs de théâtre sont des personnes intelligentes et curieuses. Tant et ausi longtemps qu’on les traitera ainsi, tout ira bien.

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