Théâtre : percevoir le public comme un partenaire

Professeure de théâtre à l’Université Harvard, metteure en scène d’opéras et de comédies musicales sur Broadway, de même qu’une des personnes les plus influentes du magazine Time en 2014, Diane Paulus est d’avis que le théâtre du 21e siècle doit tenir compte de ses racines et percevoir le public comme une composante essentielle de sa raison d’être. Elle s’est exprimée en ce sens à plus d’une reprise, notamment à TEDxBroadway et pour le compte du forum Big Think. D’ailleurs, c’est la deuxième fois que je vous parle d’elle sur ce blogue.

Selon Mme Paulus, la plupart des gens perçoivent une sortie du théâtre comme suit:

  • On se rend à un lieu de diffusion, possiblement en compagnie d’amis.
  • On pénètre dans une salle de spectacle.
  • On s’assied sur des sièges vissés au plancher.
  • Quand le spectacle commence, toute interaction avec les amis est interdite.
  • Les lumières s’éteignent.
  • Ensuite, les spectatrices et les spectateurs sont soit captivés par le spectacle ou il les indifère.
  • Une fois la prestation terminée, on demande aux gens de quitter les lieux.

Il n’en aurait pas toujours été ainsi au théâtre. Mme Paulus rappelle qu’au 5e siècle avant Jésus-Christ, en Grèce, le théâtre était un événement populaire. Les créateurs invitaient personnellement le public à assister à leurs spectacles, les gens se prononçaient sur la qualité des œuvres présentées et un drame était souvent suivi d’une courte pièce comique. L’expérience théâtrale moderne découlerait de l’avènement des salles de spectacle au 19e siècle et d’un certain élitisme envers la consommation des arts de la scène, notamment du théâtre et de l’opéra. Cette tendance se serait poursuivie au 20e siècle alors que certains artistes, craignant qu’un rapprochement avec le public pourrait mener à des compromis artistiques, ont préféré servir à leur auditoire ce dont il avait besoin (à leurs yeux) plutôt que ce qui pourrait l’intéresser.

Selon Mme Paulus:

L’art doit tenir compte des motivations du public pour que celui-ci lui accorde du temps. Le théâtre peut s’adapter à son environnement, aux circonstances, aux publics. Parfois, le théâtre est présenté sous emballage et laisse les gens indifférents. Au 21e sièce, il faut tenir compte du public, l’interpeller, l’inviter à réagir, à participer, à s’exprimer. (…) Il faut penser au théâtre non seulement comme une expérience qui dure 90 minutes ou deux heures, mais aussi à ce qui se passe avant, pendant et après une représentation.

Parmi les initiatives qu’elle a mises de l’avant pour soulever l’intérêt du public pour ses productions, notons celles-ci:

  • Des comédiens en costumes avaient pour mission de circuler à l’extérieur de la salle de spectacle avant une représentation et d’interagir avec le public.
  • Le public était invité à chanter avec les artistes pendant la présentation de comédies musicales.
  • Elle s’est associée à des organismes communautaires, choisis en fonction des thématiques des spectacles, qui ont dialogué avec le public avant ou après une représentation. La présence de ces organismes était intégrée à l’expérience proposée.
  • Elle a sollicité des partenaires qui ont parrainé des représentations destinées à des familles démunies. Celles-ci n’auraient pas eu les moyens d’assister à des performances autrement. Ainsi, les contributions de ces parrains n’étaient pas investies dans la compagnie artistique, mais dans la communauté.
  • Elle a invité des musiciens locaux à se produire dans le lobby après des spectacles et même encouragé des concerts improvisés (jams).
  • Elle initiait des discussions entre les artistes et le public après chaque représentation.

Enfin, Mme Paulus croit que le théâtre doit être un rituel partagé empreint de magie, d’apprentissage, d’empathie et d’émotions.

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